At your servitization ! Qui osera franchir le pas ?

Philip Bollen|août 17, 2021

Quel établissement de soins de santé est réellement prêt pour la servitisation ? Qui oserait confier diverses prestations de services à des tiers ? Avant de nous plonger dans les détails, commençons par définir la servitisation. La servitisation consiste à passer de la production et de la vente de produits à la fourniture et à la vente de services, ou d’une combinaison de produits, de services et parfois de biens de consommation. Cette tendance répond à l’évolution des besoins du marché, de plus en plus axé sur l’utilisation plutôt que sur la possession. Les utilisateurs finaux souhaitent de plus en plus accéder aux équipements dès qu’ils en ont besoin, sans pour autant en être propriétaires.

Dans le secteur des soins de santé, la servitisation peut faire en sorte que les équipements coûteux requis ne doivent plus être achetés, mais que les traitements qui nécessitent ces équipements puissent être achetés sous la forme d’un service (facturation à l’usage ou « pay per use »).

Le monde du « pay per use » fait de l’œil à de nombreux hôpitaux. Logique, puisque le modèle économique actuel est soumis à une pression de plus en plus forte au fil des années. Dans ce contexte, la servitisation est presque devenue le Saint Graal. On en parle. On en rêve. On philosophe à son sujet. Mais au bout du compte, rares sont ceux qui osent y tremper les lèvres. Pourquoi ?

C’est une sorte d’utopie. Des hôpitaux sans budget serré, mais avec des coûts gérables et une mise en œuvre rapide de diverses innovations. Mais nous pourrons peut-être bientôt arrêter de rêver, car en réalité, tout le monde s’accorde à dire que la servitisation pourrait bien jouer un rôle clé pour le domaine des soins de santé en l’aidant à relever divers défis.

Ceux qui, comme moi, évoluent depuis quelque temps déjà dans l’univers des soins savent que le contexte est complexe, que ce soit en termes de structure, de financement ou de contrôle. DLL souhaitait néanmoins apporter une réponse plus appropriée et plus complète que le banal « c’est compliqué ». C’est pourquoi nous nous sommes associés à Berenschot et à des étudiants en master de la Rotterdam School of Management (Erasmus University) pour obtenir une vue à 360° du champ de force. Ou plutôt deux fois 180°, car nous avons examiné la complexité de la question de la servitisation du point de vue de l’utilisateur final (l’hôpital) et du point de vue du fournisseur (les fabricants d’équipements médicaux). Notre étude a livré des conclusions intéressantes.

Conditions pour l’hôpital

Le point de vue de l’hôpital est certainement le plus diversifié, notamment en raison du champ de forces interne et de l’influence de la prise de décisions. La servitisation touche presque toutes les dimensions auxquelles le conseil d’administration, les médecins, les acheteurs ainsi que les spécialistes des TIC et des infrastructures doivent traiter. Faire en sorte que tout le monde soit sur la même longueur d’onde n’est pas une sinécure. Les considérations et les intérêts sont différents à tous les niveaux, notamment quant au fait d’être dépendant d’un seul fabricant pendant une longue période, de sacrifier la flexibilité et de conclure des contrats avec des fournisseurs qui sont encore relativement peu connus au sein de l’hôpital.

Défis pour le fabricant

Pour les fabricants (OEM) également, le passage à la servitisation exige un effort à ne pas sous-estimer. Alors oui, l’ambition est là, mais ce modèle économique nécessite une transition de grande ampleur. D’autres compétences sont nécessaires pour guider les hôpitaux et les professionnels. La vente traditionnelle de produits est remplacée par un partenariat stratégique à long terme. En plus d’être un fournisseur, vous devenez soudainement un prestataire de services. L’organisation des fabricants nécessite de nouvelles compétences pour mener ce processus à bien. Enfin, la question se pose de savoir comment le fabricant peut contrôler les performances de ses équipements et s’assurer qu’ils fonctionnent de manière optimale pour l’utilisateur.

Des partenaires pour la vie

Le monde ne s’est pas fait en un jour. Indépendamment des évolutions que le secteur doit encore traverser, la servitisation offre une foule d’opportunités. Le fabricant capable d’adapter ses équipements de manière optimale aux souhaits des médecins en maintenant des coûts d’utilisation acceptables devient un partenaire solide et s’assure des revenus à long terme. Le fabricant et l’hôpital deviennent des partenaires stratégiques et coordonnent activement leurs perspectives d’avenir.

Les hôpitaux voient disparaître le risque d’une performance décevante des équipements et se multiplier les possibilités d’innover rapidement et d’intensifier ou de diminuer l’utilisation des équipements. Les fluctuations de la trésorerie dues à des investissements importants sont de l’histoire ancienne. Elles laissent la place à un flux de trésorerie prévisible, qui permet une planification financière adéquate.

En résumé, si peu d’acteurs du secteur des soins de santé osent adopter la servitisation, c’est, d’une part, en raison de la complexité de la prise de décisions et de la peur de l’inconnu. D’autre part, la servitisation nécessite de nouvelles connaissances et compétences spécifiques ainsi qu’une gestion d’entreprise adaptée. Tout cela prend du temps. Mais que cela ne nous arrête pas. Au final, il y a une belle opportunité à saisir.

Vous souhaitez lire le rapport complet de DLL, Berenschot et la Rotterdam School of Management sur la servitisation dans le secteur des soins de santé ? Envoyez-moi une invitation ou un message personnel ; je me chargerai de vous le faire parvenir.

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